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Tout pourrait commencer par le renversement d’une table. Non pour la jeter à terre ou la briser mais pour la soulever, la lancer en une diagonale, l’inciser afin d’y faire pénétrer le ciel et l’air .

Les objets sont construits. Ils sont stables parce qu’ils assurent leurs fonctions. Les objets nous reposent du mouvement du monde. Nous pourrions croire que celui-ci est, là, calmement arrangé pour un repas ou comme un atelier d’outils sur une table et qu’il suffit de se servir ou de s’en servir. La sculpture, qui n’est jamais un objet, n’a que faire de cette construction solide. Pierre Tual le sait qui envoie au tapis, culbute ou relève, plie et tord la matière afin de la faire pénétrer en un nouvel espace. Cet espace est celui du basculement.
Il qualifie sa sculpture qui est, avant tout, le lieu d’une métamorphose.

La couleur passe en l’obscur, le décortique, se fraye, littéralement un chemin dans l’air pour que s’épanouisse matériellement, cette route, ce passage. Il prendra les formes évidentes d’un territoire parcouru, d’un « campement » où furent conçus les signes d’une présence recelant l’instabilité et la qualité du dessein : l’équilibre précaire, les côtoiements, la tension, la fragilité de la position pratique et poétique et les valeurs philosophiques qu’ils présupposent. L’important comme chez Cratyle, est de maintenir en toute chose conservée, en toute forme érigée, l’esprit vivant de la mobilité.

 Olivier Kaeppelin
Catalogue C.R.A.C. le 19
Montbéliard 1997

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